Dans le rayon des produits d'hygiène-beauté, des étiquettes rouges, vertes ou jaunes promettent tous les dix centimètres, du haut en bas de la gondole, une économie de quelques centimes, un "repère qualité", un "prix baissé" sans autre détail, sans oublier les produits écologiques. Ce qui rend pratiquement impossible de repérer la fléchette rouge qui annoncent la baisse de 21% de telle ou telle marque de dentifrice.
Déjà surnommées "baisses Sarko" par les chefs de rayons, ces réductions très ciblées sur quelques centaines de produits de grande marque ont pourtant donné du travail la nuit précédente à tous les chefs de rayons. "Nous avons installé 144 étiquettes cette nuit et encore 329 sont à venir", explique Jean Chateau, directeur du magasin. Une goutte d'eau, il est vrai, par rapport aux 50.000 références de ce "petit" hypermarché de 4.000 m2.
Les quelque 2.700 baisses promises par les fabricants et les distributeurs ne seront en effet installés que très progressivement dans les grandes surfaces. Dans d'autres rayons, comme les cafés ou les yaourts, les "baisses Sarko" sont plus visibles, avec des taux alléchants dépassant parfois les 20%. Mais si beaucoup de clients disent s'en réjouir, ils se montrent déjà blasés.
"C'est à peine un rattrapage par rapport aux hausses de l'euro", se plaint Pascal, 40 ans. "Je ne fais pas attention aux prix, je choisis la marque que je connais, de toutes façons on n'arrive pas à s'y retrouver ni à se souvenir des prix", commente Monique, 51 ans. "Il y a tellement d'étiquettes, c'est complètement confus", se plaint Irène, 49 ans, qui dit n'acheter de toutes façons "que ce dont elle a besoin et toujours la même chose".
La plupart des clients, sauf ceux juste revenus de vacances, disent cependant avoir "beaucoup entendu parler des baisses Sarkozy à la télévision". "Pour nous, ces baisses ne sont pas une opération essentielle", minimise le directeur du magasin, "mais les gens s'y attendent, et voient que nous suivons la dynamique".
Chez Leclerc Levallois, aux portes nord de Paris, la stratégie sur les "baisses Sarkozy" est radicalement opposée, mais aboutit en gros au même résultat: ces réductions ont été directement intégrées à de nouvelles étiquettes prix ces derniers jours, sans référence à une opération spéciale. "J'ai renouvelé depuis le 25 août toutes mes étiquettes prix", explique nonchalamment Patrick, responsable du rayon yaourts. "En fait on a tout baissé de 2% et même beaucoup plus pour certains produits", souligne-t-il -- ce qui confirme la décision annoncé par Michel-Edouard Leclerc de baisser tout d'office de 2% au moins, avec ou sans l'accord des fabricants.
Les seules affichettes posées dans les rayonnages signalent la marque Leclerc ou une vaste promotion de rentrée. "Mais les gens s'aperçoivent des baisses: le paquets de 12 yaourts Danone est passé sous les 2 euros, à 1,93 contre 2,29 euros, et je n'en ai déjà plus. Avant j'en commandais tous les deux jours, maintenant tous les jours", explique Patrick. Car pour Leclerc, chantre de la guerre des prix, 2% sont loin de suffire. De grandes affiches suspendues dans les allées proclament ce credo: "en septembre les prix des grandes marques baissent de 2%, on ne va pas s'en plaindre mais on ne va pas s'arrêter là non plus", prévient l'enseigne, grand rival de Carrefour en France. |